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Dominique Fortier

Les langagières et les langagiers sont‑ils encore utiles?

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Ça ne s’invente pas. Voici le genre de traduction que l’on voit régulièrement sur l’emballage de produits en vente au Québec. C’est tellement gros qu’il vaut mieux en rire.

Lisez la description du produit (pardonnez la piètre qualité des photos qui suivent) et dites-moi si vous y avez compris quelque chose. Le francophone moyen en perd son latin.

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Maintenant, à la lumière de l’anglais, vous allez franchement rigoler.

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Que dites-vous de la traduction de spill proof par « renverser la preuve »? Pas facile à faire, vous admettrez, avec un tube de crème à mains. C’est pas compliqué, on passe du voyage au tribunal en trois mots (qui ne font même pas sens tels quels dans le domaine juridique). Et de celle-ci : Tubes are dishwasher safe par « Les tubes sont au lave-vaisselle » (on a bêtement traduit le are par « sont », sans s’occuper du safe). Ben voilà, vous êtes prévenus, pas la peine de les chercher ailleurs au moment de partir. Il s’agissait d’y penser : c’est là qu’on range les articles de voyage.

Je vous vois vous bidonner en vous tapant sur les cuisses… Ha! ha! ha!… elle est bien bonne, « n’est-il pas? » (traduction littérale de la question tag [locution adverbiale interrogative de fin de phrase] isn’t it que l’on trouve dans Astérix chez les Bretons, et qui se traduit normalement par « n’est-ce pas? »).

Et ce n’est pas tout. Voici comment on a traduit le nom du produit :

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Hi! hi! hi! Qu’est-ce que vous en dites? de majoré pour traduire le symbole + (plus) de l’anglais? Comique, n’est-il pas? Et en plus, c’est le voyage qui est majoré. Alors ces contenants ne s’apportent que si le prix du voyage augmente, on dirait. La belle affaire! Et je passe sur le fait que ce ne sont pas des bouteilles (habituellement rigides), en réalité, mais bien des tubes (correctement nommés dans la description du produit) sur lesquels on exerce une pression pour faire sortir des crèmes ou des gels. Si l’on changeait « bouteilles » pour « tubes », il faudrait ajuster également l’espagnol.

Voici maintenant ce qu’on aurait dû voir en français sur l’étiquette accompagnant le produit :

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Et pour terminer, voici le processus de correction en image du texte descriptif :

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À noter que les mots qui accompagnent la photo et les pictogrammes, dans la colonne de droite, ne sont qu’en anglais, comme si le français et l’espagnol n’existaient plus. On aurait pu travailler sur le graphisme pour corriger cette situation. Les réviseures et réviseurs sont, à cet égard, de bon conseil.

L’exemple présenté ici, bien que TRÈS GROS, prouve hors de tout doute que les langagières et les langagiers professionnels, spécialistes de la traduction ou de la révision de textes bilingues ou multilingues, sont non seulement utiles, mais indispensables. Ces personnes s’assurent que le message à communiquer « coulera de source » et que le public auquel il s’adresse le comprendra immédiatement, sans avoir à chercher l’équivalent en anglais.

Et puisqu’il vaut mieux en rire, voici un petit « jeu de mots » qui illustre les dangers de la traduction littérale.

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6 Comments on “Les langagières et les langagiers sont‑ils encore utiles?”

  • Dwain Richardson

    says:

    Quel texte pertinent en cette Journée internationale des traducteurs (et pourquoi pas, des autres langagiers tous confondus)! Dommage que certaines entreprises et certains individus ne voient toujours pas l’essentiel des professionnels comme nous. J’espère qu’un jour que le grand public se rendra compte de l’importance que nous accordons aux textes et aux styles écrit et oral, et que le public pensera à nous consulter pour tous leurs besoins langagiers.

    • Lysane Jacques

      says:

      Très drôle, et malheureusement vrai. En s’attardant quelque peu, on trouve de ces hilarités un peu partout. Je crois fermement que les langagiers et langagières ont plus que jamais leur place au sein des entreprises. Vu sur la pancarte d’un agent immobilier: Open house – Maison ouverte. Tout est dit.

      • C’est vrai, et dans tous les domaines de la vie et tous les types de textes, surtout lorsqu’ils sont imprimés (permanents).

    • C’est vraiment difficile pour les entreprises et les gens qui ne publient pas souvent de textes de trouver les bonnes ressources afin de faire réviser ou traduire leurs textes, surtout lorsqu’ils sont dans d’autres pays. Mais ça ne les excuse pas. Je crois qu’ils ne réalisent pas à quel point ils se font du tort. Et avec l’avènement d’Internet (instantanéité, éphémérité), c’est encore pire.

      Bonne journée internationale des traducteurs en retard. 😉

  • Moi

    says:

    *qui n’ont même pas de sens (pas “qui ne font même pas de sens”)! 😉

    • Tu n’as pas bien lu. C’est écrit « qui ne font même pas sens » sans « de ». Définition du Multi : « Faire sens.  Avoir un sens, être logique. » 😉

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