L’expression « nègre littéraire » abondamment utilisée dans le contexte de ces auteurs qui écrivent pour les autres s’est bien heureusement perdue dans les temps.
Selon la littérature, c’est depuis 1932 que l’Académie française propose de supprimer cette injurieuse expression au profit de : « Il se dit, en langage d’atelier, d’un auxiliaire qu’on emploie pour préparer un travail, pour en exécuter la partie en quelque sorte mécanique. »
Depuis ce temps, la traduction de l’expression anglo-saxonne ghost writer, propose le terme « d’écrivain fantôme » ou « d’écrivain de l’ombre » ou encore de « rédacteur anonyme ».
Le Trésor de la langue française donne la définition suivante : « personne anonyme qui rédige pour une personnalité, qui compose les ouvrages d’un auteur connu ». On a alors une définition moderne d’une pratique très ancienne.
Il n’est pas rare que les vedettes, entrepreneurs, politiciens et chefs d’entreprise aient recours aux services d’écrivains fantômes pour coucher leurs pensées sur papier. Entre 60 et 80 % des écrits non romanesques sont de la plume de tels écrivains. Et le bruit court que quelques romanciers à succès ont aussi recours à leur aide.
On ne donne pas souvent la parole aux rédacteurs anonymes, on les snobe : c’est tellement facile … Attention, la rédaction anonyme est loin d’être ennuyeuse, mais n’est pas faite pour ceux qui n’en ont que pour leur égo. Ceux qui envisagent une telle carrière doivent être prêts à s’effacer.
Dans le monde très discret de la rédaction scientifique et médicale anonyme, l’assistance au plan rédactionnel est offerte aux chercheurs, soit en procédant à des analyses et des synthèses au cours de la production de documents spécialisés reliés à leurs activités de recherche, soit en supervisant la correction d’épreuves et la version finale de leurs publications.
C’est également le cas pour ceux qui utilisent le travail de recherche effectué sous leur direction pour des mémoires ou des thèses et qui s’approprient ce travail anonyme sans jamais mentionner son origine.
Ce qui revient à dire que, sur des airs de collaboration, ces rédacteurs anonymes suppléent aux lacunes des auteurs officiels. Ils sont donc en permanence confortés dans leur choix de faciliter la publication et la vulgarisation d’œuvres scientifiques et éducatives, d’accroitre l’utilisation de la recherche et de diffuser le savoir.
Je ne pense pas qu’il faille être spécialiste pour rédiger des travaux comme ceux-là, mais il est évident que de bonnes connaissances dans le domaine médico-pharmaceutique sont un atout.
La pratique de la rédaction anonyme est courante auprès des entreprises pharmaceutiques et dans le monde médical où les publications sont signées de la plume de chercheurs universitaires qui n’en sont pas les uniques auteurs. Cette pratique qui existait depuis longtemps dans la médecine universitaire ne risquait pas de porter atteinte à l’intégrité de la recherche médicale, car bien que la nature des écrits d’un duo écrivain-chercheur [leurs écrits] soit aussi variée que leur style, une constante les relie : la confidentialité.
Les rédacteurs anonymes, hommes et femmes de l’ombre par excellence, sont rarement reconnus pour leur travail. Ils œuvrent en silence, loin des feux de la rampe. Mais tout document nécessite qu’on fasse des recherches, car personne n’est omniscient, et ce qui est fantastique avec la rédaction anonyme, c’est qu’à travers ces recherches, le rédacteur apprend énormément.
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Le billet précédent de Micheline Fréchette: Édition de matériel de sensibilisation.
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