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Christian Bergeron

Quand les noms perdent leur latin

Photo : reference design
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Stégosaure, tricératops et vélociraptor : ces noms vous disent sûrement quelque chose. Si vous êtes moindrement curieux ou si, comme moi, vous avez des enfants qui ont grandi à l’époque de la fièvre du Parc jurassique, je suis sûr que vous avez des images de dinosaures dans la tête.

Mais si je vous dis Brachychampsa, que voyez-vous? Et Troodon, et Parasaurolophus? Ce sont évidemment d’autres dinosaures, mais ils sont beaucoup moins connus.

Où est-ce que je veux en venir? Au problème que ces noms posent au réviseur. J’ai été appelé l’an dernier à réviser les textes de l’exposition permanente « Humain », inaugurée en octobre dernier au Centre des sciences de Montréal. On y explore l’espèce humaine et, au moyen de divers outils interactifs, les liens qui l’unissent aux autres espèces, qu’elles soient encore vivantes ou éteintes depuis des millions d’années.

L’un des éléments de l’exposition est un système interactif sous forme d’écran, appelé « L’arbre de la vie », qui permet de faire connaissance avec les espèces et de voyager parmi toute l’étendue de l’évolution de la vie sur terre. Cet outil foisonne de noms scientifiques en latin, qu’il s’agisse de bactéries ou d’animaux plus évolués. Car évidemment, nous n’avons pas de noms communs pour toutes les espèces : il y en a beaucoup trop! Or, les noms latins doivent être en italique, comme le sont habituellement les noms en langue étrangère. Sauf qu’il arrive que des noms scientifiques passent dans le langage commun : Stégosaurus devient alors stégosaure et Tricératops devient… ou plutôt demeure « tricératops ». Les voilà acceptés dans la langue familière.

Pas toujours facile de faire la part des choses dans ce domaine, car ce qui est inconnu pour l’un peut être « commun » pour d’autres. Ainsi, Drosera capensis est une plante carnivore dont les feuilles gluantes piègent les insectes à la manière d’un papier tue-mouches. Elle n’a pas de nom commun. De son côté, Dionaea muscipula, qui fait partie de la même famille, est mieux connue sous le nom de « dionée gobe-mouche ». Pourquoi a-t-elle droit à un nom commun? Peut-être à cause de son côté spectaculaire, elle dont la feuille se referme d’un coup sec lorsqu’un insecte la touche à deux endroits en même temps. En plus des mouches, elle a su capter… notre attention.

Mais quand on révise, il faut demeurer également attentif, que l’on se trouve devant un sujet que l’on connaît bien ou qui nous tient à cœur, ou devant un autre qui nous indiffère. Il faut aimer la recherche! Personnellement, dans le cadre de ce projet, je n’ai cessé de découvrir des choses, puisque j’ai eu à me renseigner sur une multitude de concepts et d’espèces, des bactéries jusqu’aux dinosaures en passant par les autruches, les coraux et les moisissures. Et j’en ai vérifié, des orthographes de noms étranges ou jamais vus. Vous connaissiez ça, vous, le « coqueret alkékenge »? (Je vous laisse trouver ce que c’est.)

En fin de compte, j’ai surtout constaté qu’il existe des zones d’ombre entre les noms scientifiques et les noms communs. Qu’est-ce qui fait qu’un nom devient commun? Ce n’est pas toujours évident. Ce qui est certain, cependant, c’est que ce fut un beau défi de contribuer aux textes de cette exposition. Si vous l’avez visitée, dites un peu ce que vous en avez pensé!

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