L’an dernier, le Musée de l’aviation et de l’espace du Canada m’a confié le mandat de traduire les textes de l’exposition « Star Trek : L’expérience Académie de Starfleet ». Moi qui adore découvrir de nouveaux univers, j’étais servi! J’ai donc couru à la Grande Bibliothèque emprunter l’un des rares ouvrages de référence disponibles en français sur la série mythique, et je me suis mis au travail.
Ce fut un projet unique dès le début. Il fallait d’abord m’assurer de bien orthographier les noms des multiples espèces (Romuliens, Bétazoïdes, Jem’Hadars, etc.) et ceux des personnages (attention aux prénoms comme B’Elanna, T’Pol et Lwaxana!).
Vinrent ensuite les grades militaires, de première importance dans cet univers. Il faut savoir que l’action de Star Trek, qui se déroule entre les 22e et 24e siècles, gravite autour de navires spatiaux dont les codes sont inspirés de la marine. Pouvais-je me fier aux tables d’équivalence de grades actuelles, et faire d’un lieutenant commander anglais un « capitaine de corvette » français? Pas sûr…
Et puis il y avait les accessoires technologiques : cet appareil de diagnostic médical, c’est bien un tricordeur? L’hypospray garde-t-il le même nom en français qu’en anglais? Ah, j’aurais bien aimé avoir accès au « traducteur universel » que possède tout bon officier des communications dans Star Trek!
Parlant de traduction, il y avait aussi des langues imaginaires, dont le fameux klingon. L’exposition proposait même une section « Klingon 101 » où les visiteurs pouvaient s’essayer à prononcer quelques phrases dans cette langue gutturale d’un peuple guerrier. Je n’avais évidemment pas à traduire directement du klingon, mais il fallait rendre en français les équivalences anglaises fournies.
Dans ce contexte, pas toujours facile de valider certains choix. Je n’avais parfois d’autre recours que de trouver un extrait vidéo en français — mais où? Avec plus de 700 épisodes de séries télé, 13 films et quantité d’autres sources, la tâche était parfois impossible.
J’ai vite repéré sur Internet de nombreux sites de référence bâtis par des amateurs. Memory Alpha, une encyclopédie participative de type Wiki, offrait la meilleure source francophone… mais à quel point pouvais-je m’y fier?
Cela posait la question de la confiance qu’on peut avoir dans ce type de site. Nous savons tous que même sur Wikipédia, il arrive souvent que, pour des raisons politiques ou commerciales, l’information soit présentée de manière subjective, ce qui peut fausser la piste du langagier honnête! Heureusement, ce problème ne semble pas affecter les mondes imaginaires : puisque l’information qu’on y trouve est fictive, qui voudrait la trafiquer? Ceux qui contribuent à Memory Alpha semblent chercher par-dessus tout à créer une somme décrivant le monde de Star Trek le plus précisément possible.
J’ai trouvé là beaucoup de réponses à mes questions, tout en demeurant critique face à cette source « non officielle » où les fautes d’orthographe ne sont pas rares. Mais comme ma plus grande crainte était de décevoir les fanatiques de Star Trek en commettant une erreur grossière, je risquais moins en me basant sur ce qu’eux-mêmes produisaient comme information!
Alors j’ai dit comme les Klingons : « NuqneH! » ou « Que voulez-vous? ». S’il s’agit pour eux d’une salutation, pour moi c’était devenu une marque de fatalisme.
Je me suis tout de même assuré qu’on mette des apostrophes courbes dans les phrases comme « Hab SoSlI’ Quch! »… au cas où. (Cette insulte klingonne signifie « Votre mère a le front lisse! » : la comprenez-vous?)
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Le billet précédent de Christian Bergeron: Docteur, j’ai un problème.
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